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Norbert Lenoir, Marseille.
« Rousseau et la radicalité démocratique »

Vendredi 27 avril 2012.

 

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Introduction

La radicalité politique de Rousseau n’est pas où on la met souvent : dans la défense inconditionnelle d’une démocratie directe. Cette radicalité se structure bien plutôt à partir d’une double caractérisation :

La première est de proposer un dépassement de l’alternative entre la démocratie directe et la démocratie représentative, cette dernière qui n’est qu’un oxymore pour Rousseau. Ce point repose sur ce préalable : la radicalité démocratique ne peut apparaître qu’à partir d’une critique du principe de la représentation. Cette critique permet de dégager le principe démocratique de l’identité qui est l’expression même de la radicalité démocratique chez Rousseau. Disons-le d’emblée ce principe identitaire n’a rien à voir avec une logique de reconnaissance des minorités ethniques, politiques, sexuelles etc. Il ne s’agit pas de reconnaissance d’identités multiples des individus, mais de production de la politique au moyen du seul principe démocratique qui est celui de l’autoconstitution du peuple. Ce principe est pour Rousseau la seule façon de répondre à cette question : comment faire advenir ce seul sujet possible de la démocratie – le peuple – sans en faire un alibi d’une captation de sa puissance par une entité extérieure à lui ? Si la démocratie signifie le pouvoir du peuple, elle ne peut être réelle que si ce peuple est l’expression de l’identité entre la souveraineté et le souverain, le pouvoir de consentir et la puissance de décider. Cette détermination nous conduit à la deuxième caractérisation de la démocratie chez le Genevois.

En effet, Rousseau, en identifiant la démocratie au principe d’identité, qui est chez lui le nom de la puissance constituante comme synthèse entre la souveraineté et le souverain, développe une critique de la représentation tout en posant la nécessité de médiations politiques, mais de médiations qui ne donnent pas au pouvoir une logique oligarchique. Rousseau refuse que la représentation soit la seule forme possible dans laquelle penser les médiations démocratiques entre le peuple et ses institutions. Le moment rousseauiste du politique coïncide donc avec l’affirmation que la démocratie n’est réelle que dans la tension qu’elle instaure entre la puissance effective du peuple et les moyens institutionnels qu’il constitue pour sa mise en œuvre. Penser la démocratie ce n’est donc pas fuir cette tension mais s’y installer. Alors la démocratie en décidant que cette tension n’est pas ce qui la nie mais ce qui peut la vivifier, invente des dispositifs pour y répondre, invente des institutions qui ne privent pas le peuple de sa puissance mais lui donne au contraire des possibilités d’interventions multiples. La démocratie est une perpétuelle tension qui doit empêcher la pétrification de la puissance constituante par les pouvoirs constitués. Par conséquent, la démocratie est une perpétuelle invention et rectification des moyens par lesquels on parvient à institutionnaliser la puissance du peuple.

Précisément, le peuple démocratique n’est pas celui qui va docilement voter tous les cinq ans mais c’est celui qui prend en charge cette tension qui constitue la vie même de la démocratie. Ainsi, Rousseau réfléchit les institutions politiques à partir de cette définition d’un peuple qui doit être placé à l’articulation du pouvoir constituant et des pouvoirs constitués. Le peuple est un peuple radical qui ne s’arrête pas à la formulation de la volonté générale. Et c’est ce peuple de la radicalité démocratique qui nous permet de penser notre présent politique.

1- Critique de la représentation.

Cette critique montre que la logique représentative ne peut pas conduire à une logique démocratique car elle organise nécessairement des séparations sociales et politiques. Rousseau a l’intuition que ce type de régime favorise la constitution de volontés politiques qui, en devenant de plus en plus indépendantes des citoyens, expriment, non plus l’intérêt général, mais des intérêts particuliers et institutionnalisés. Cette intuition est le fond de la critique rousseauiste : « Le peuple ne peut avoir de représentants, parce qu’il est impossible de s’assurer qu’ils ne substitueront point leurs volontés aux siennes, et qu’ils ne forceront point les particuliers d’obéir en son nom à des ordres qu’il n’a ni donné ni voulu donner. »[1]  Sa critique est sous-tendue par l’idée que les représentants possèdent dans leurs décisions politiques une certaine indépendance vis-à-vis de la volonté des citoyens-électeurs. Cette indépendance fait craindre à Rousseau que la volonté du peuple ne soit plus la force motrice du politique. Ce constat n’est pas la résultante d’une simple inquiétude, mais d’une compréhension d’une logique inhérente à la représentation politique.

Rousseau ne rejette donc pas la représentation parce qu’elle ne correspondrait pas à une image idéalisée de la belle totalité antique, mais parce qu’elle produit nécessairement un écart politique entre les représentants et les représentés. La représentation est donc animée non pas par une volonté d’assurer une proximité politique avec les citoyens, mais au contraire par une volonté de distanciation politique et sociale entre les représentants et les représentés.

C’est pour cette raison que Rousseau définit le représentant par ce trait psychologique : « Sans cesse attentif à marquer des distances trop peu sensibles dans ses égaux de naissance, il ne voit en eux que ses inférieurs, et brûle d’y voir ses sujets. »[2]

Mais évidemment, la logique représentative ne s’explique pas seulement à l’aide de ce trait psychologique. Ou bien plutôt ce n’est pas une psychologie propre au représentant qui explique la structure dissociative de la représentation politique, mais c’est cette structure propre à la représentation qui fait naître nécessairement la séparation et la psychologie du représentant. Cette structure apparaît dans cet avertissement rousseauiste :

Je dis donc que la souveraineté n’étant que l’exercice de la volonté générale ne peut jamais s’aliéner, et que le souverain, qui n’est qu’un être collectif, ne peut être représenté que par lui-même ; le pouvoir peut bien se transmettre, mais non pas la volonté.[3]

Dans ce passage, il réaffirme la pleine identité, pour une démocratie, de la souveraineté et du souverain : le souverain est le peuple exerçant par lui-même sa puissance politique, c’est-à-dire sa souveraineté. Le peuple est pour Rousseau cette réalité politique qui assure la synthèse entre la souveraineté et le souverain. La démocratie représentative ne peut être qu’un oxymore puisqu’elle dissocie précisément le principe actif de la démocratie l’identité sise dans le peuple entre le souverain et la souveraineté. Justement, Rousseau nous donne dans ce texte la raison avancée par ceux qui soutiennent la liaison entre démocratie et représentation. Ils établissent une analogie entre le pouvoir et la volonté : comme le pouvoir peut se déléguer, la volonté peut se transmettre. Dans le premier cas on parlera d’un exécutant, dans le second cas d’un représentant. Mais pour Rousseau, de la délégation du pouvoir à la transmission de la volonté la conséquence n’est pas bonne. Elle ne peut pas l’être car le pouvoir n’est pas de même nature que la volonté. En effet, on peut agir pour un autre s’il est dans l’incapacité de le faire, mais on ne peut exercer la faculté de vouloir d’un autre, puisque ce serait exercer le pouvoir de vouloir de cet autre. Aux yeux de Rousseau, la « démocratie représentative » détruit le lien identitaire entre souverain et souveraineté car elle prive le peuple de volonté. La représentation n’existe qu’en entretenant constamment cette fiction : la volonté du représentant exprime et reflète parfaitement celle du représenté. A cela, Rousseau souligne que la volonté est l’exercice de son droit propre, car on manifeste sa propre volonté, non la volonté d’un autre. Dans le système représentatif, c’est le représentant qui veut et qui veut à l’insu du représenté et souvent contrairement à ce qu’il aurait voulu. Ce système prive la liberté de ses conditions d’exercice car il crée un état de soumission puisque « la liberté consiste à n’être pas soumis à la volonté d’autrui ».[4] La représentation détruit la liberté car le représentant absorbe tout l’exercice réel de la volonté. L’acte de volonté n’émanant que du seul représentant, le représenté perd toute réalité politique puisque n’existe politiquement que celui qui veut et agit en fonction d’une volonté dont il est l’auteur. Alors on peut dire avec le Genevois : « A l’instant qu’un Peuple se donne des représentants, il n’est plus libre ; il n’est plus ».[5] En effet, si le représentant veut à la place du représenté, alors sa volonté se substitue à celle du représenté et par conséquent cette dernière volonté est soumise à une volonté externe.

L’analogie entre la délégation du pouvoir et de la volonté a pour but de créer la fiction de l’homogénéité des volontés entre celles des représentés et celles des représentants. Cette homogénéité est une pure fiction car le peuple possède nécessairement un caractère irreprésentable. Cette idée est contenue dans cette affirmation qui inverse celle qui légitime la représentation : « où se trouve le représenté, il n’y a plus de représentant ».[6] Le caractère irreprésentable du peuple provient de sa puissance volontaire de décision qu’il ne peut déléguer qu’en disparaissant : seul un être rendu absent peut être représenté. C’est cet aspect irreprésentable qui fonde la radicalité sur l’identité. Toute pensée sur la constitution des pouvoirs politiques, si elle se veut véritablement démocratique doit tenir compte de cet aspect irreprésentable du peuple. En tenir compte, cela signifie que la représentation ne peut pas régler le problème de la démocratie : seule une théorisation de l’institutionnalisation du pouvoir populaire le peut.

2- La démocratie et l’identité.

La représentation aménage un espace asymétrique de la puissance politique en créant un différentiel entre la volonté et l’action politiques. A partir de la différence représentant / représenté, il s’agit d’absorber tout le pouvoir de décision du représenté vers le représentant. La démocratie est une réponse à ce différentiel de la puissance politique car elle crée un espace où le principe identitaire supprime toute asymétrie de puissance.

Le vrai caractère de l’égalité démocratique apparaît alors : elle n’est pas seulement l’égalité des droits, mais l’égalité d’accès au pouvoir politique. Tous les citoyens peuvent participer à la décision politique. Cet exercice réel du pouvoir par chaque citoyen est rendu possible par la structure identitaire de l’espace démocratique, espace défini par ce texte :

Cette personne publique qui se forme ainsi par l’union de toutes les autres prenait autrefois le nom de Cité, et prend maintenant celui de République ou de corps politique, lequel est appelé par ses membres État quand il est passif, Souverain quand il est actif, […] A l’égard des associés ils prennent collectivement le nom de Peuple, et s’appellent en particulier citoyens comme participants à l’autorité souveraine, et sujets comme soumis aux lois de l’État.[7]

Dans ce texte, Rousseau produit l’identification pleine et entière entre démocratie et identité. La démocratie est le nom de cette logique identitaire qui fait que la même communauté soit à la fois souveraine et sujette de sa propre législation.

On peut dire qu’il dévoile deux principes antinomiques de structuration de la société politique : le principe de la représentation qui produira nécessairement une oligarchie élective et le principe identitaire qui permet le développement de la logique des équivalences qui rend possible le déploiement de la démocratie. En effet, comme nous l’avons souligné la représentation est rendue possible par la mise en place de toute une série de différences, représentants / représentés, élus / électeurs, experts / citoyens, etc. Tous ces couples ne se déterminent que par un processus d’absorption du pouvoir. Le premier terme de chaque couple, représentants, élus, experts, n’existe qu’en captant et absorbant le pouvoir du second terme, représentés, électeurs, citoyens. La démocratie est donc nécessairement non représentative car sa logique est profondément non séparatrice. Elle repose sur l’affirmation de l’équivalence de tous les citoyens : n’importe quel citoyen possède la capacité politique.

Cependant, la démocratie repose elle aussi sur des couples : Souverain / État, Citoyens / sujets. Mais ces couples ne se construisent pas à partir de la négation du second terme par le premier. Le Souverain, le Citoyen ne se déterminent pas à partir de la négation de la capacité de décision du second membre État et Sujet. Par conséquent, loin d’avoir comme dans la représentation des jeux de couples opposés, nous n’avons dans une démocratie que la manifestation d’un seul et unique sujet sous deux modes politiques : l’actif et le passif. La passivité et l’activité sont le jeu de la déclinaison identitaire de ce même et identique sujet qui est le peuple.

Le peuple ne reste acteur que si la communauté politique repose sur la seule propriété démocratique : l’identité. C’est bien la même communauté qui, en tant que corps politique, est à la fois mais non indistinctement, Souverain et État. Et à l’intérieur de cette même communauté, les individus jouissent eux aussi de ce statut identitaire : en tant que membres du peuple, les mêmes individus sont à la fois, mais non indistinctement, Sujets et Législateurs. C’est bien ce que souligne Rousseau : « Dans une Démocratie, les sujets et le souverain ne sont que les mêmes hommes considérés sous différents rapports »[8]. Alors que la représentation est un dispositif politique qui clive le pouvoir et la puissance, l’identité affirme leur lien irréductible dans ce seul sujet du politique : le peuple. La démocratie n’existe qu’en vertu de ce sujet qui produit l’identité entre le pouvoir et la puissance politique. Le peuple n’est donc pas celui qui consent seulement au pouvoir, mais c’est celui qui en produit par cette puissance identitaire d’être à la fois le Souverain et l’État. C’est la puissance de l’identité, et l’identité de la puissance, qui crée la radicalité démocratique.

Cette définition par l’identité arrache la notion de sujet de tout son potentiel d’assujettissement puisque le sujet, en renvoyant toujours à sa capacité de décision politique, prend désormais le nom de citoyen : « Ces mots de sujet et de souverain sont des corrélations identiques dont l’idée se réunit sous le mot de citoyen ».[9]

C’est bien la même communauté qui, en tant que corps politique, est à la fois mais non indistinctement, Souverain et État. Et à l’intérieur de cette même communauté, les individus jouissent eux aussi de ce statut identitaire : en tant que membre du peuple, les mêmes individus sont à la fois, mais non indistinctement, Sujets et Législateurs. Le peuple développe donc son identité à deux niveaux : au niveau collectif, en tant que communauté qui doit rester souveraine en refusant d’aliéner sa puissance politique dans une instance extérieure à elle et au niveau individuel, puisque tous les citoyens peuvent participer à la puissance politique.

Définir la démocratie par l’identité c’est affirmer qu’un peuple n’est un peuple que si perdure en lui cette coïncidence entre le consentement au pouvoir et l’exercice de la puissance de décision politique. Ainsi, alors que la représentation est un dispositif politique qui clive le pouvoir et la puissance, l’identité affirme leur lien irréductible dans ce seul sujet du politique : le peuple. La démocratie n’existe qu’en vertu de ce sujet qui produit l’identité entre le pouvoir et la puissance politique. La représentation produit précisément un peuple manquant en clivant le pouvoir et la puissance. Le peuple ne dispose plus que d’une capacité éphémère de consentement au pouvoir.

La démocratie de Rousseau ne met pas en son centre le consentement au pouvoir, mais la production d’un espace de pouvoir dans lequel le peuple crée et exploite sa propre puissance. Cette détermination donne un nouveau sens au lien entre le consentement et la démocratie à distance du consentement fabriquant la représentation et la consécration du peuple manquant. En effet la radicalité démocratique affirme que ce n’est qu’en exerçant sa pleine puissance de décision que le peuple consent à lui-même. C’est la seule façon d’empêcher que le consentement ne soit que la phase préparatoire au transfert de la puissance politique du peuple.

Alors s’il y a un mouvement démocratique c’est celui du cercle. L’égalité est le cercle par lequel la démocratie s’instaure et dans lequel elle existe. Alors toute décision doit « partir de tous pour s’appliquer à tous »[10]. Ainsi, la démocratie se définit strictement comme le cercle du pouvoir et le pouvoir du cercle. Ce chiasme démocratique signifie précisément que le pouvoir n’est démocratique que s’il parvient à courber l’espace social et politique pour permettre ce mouvement de la décision qui seule peut se qualifier de politique : partir de tous pour s’appliquer à tous. Ce cercle se réalise pour Rousseau dans l’identité. Cette identité de l’activité et de la passivité politique n’est que l’autre nom de notre chiasme démocratique.

Le peuple chez Rousseau, en vertu même de cette égalité constituante n’est donc pas seulement un pouvoir que l’on convoque tous les cinq ans pour constituer une majorité électorale, mais la manifestation de la puissance politique de l’identité entre la souveraineté et le souverain. C’est la puissance de l’identité et l’identité de la puissance qui crée le cercle démocratique. Ce cercle signifie que le peuple rousseauiste ne prend pas le pouvoir car il est le pouvoir et il est le pouvoir car il le construit à travers cette structure identitaire de la décision.

Mais précisément, Rousseau ne s’est-il pas rendu à cette évidence, n’a-t-il pas abandonné les attendus du principe d’identité pour enfin être raisonnable et se ranger du côté de la réalité de la nécessité de la représentation politique ? En effet, il affirme : « Dans les grands États la puissance législative ne peut s’y montrer elle-même, et ne peut agir que par députation »[11] Face à cette affirmation, on peut choisir entre deux hypothèses de lecture.

La première mettra en avant l’épreuve du principe de réalité qui battrait en brèche les attendus désirés du Contrat Social. Ces attendus du peuple souverain dans son identité entre le pouvoir de consentir et la puissance de décision ne seraient alors qu’un simple résidu politique fantasmé que l’on devrait abandonner au nom du réalisme politique. Ainsi, face à la réalité politique, le principe d’identité démocratique serait frappé d’invalidité.

La deuxième hypothèse, que nous retiendrons car nous la pensons plus féconde, invite à penser la nécessité de la députation non pas comme une solution de repli mais bel et bien comme un prolongement de la détermination de la démocratie par le principe d’identité. L’existence des médiations politiques comme la députation, loin d’annuler le principe démocratique de l’identité le renforce en le dédoublant. C’est pour cette raison que l’on peut parler chez Rousseau d’une identité démocratique à deux degrés. Le premier degré est celui du Contrat Social, comme détermination abstraite du principe de la démocratie dans la déclinaison identitaire du peuple. Le second degré est celui de la mise en regard du principe de l’identité avec la réalité des différences sociales et politiques qui entraînent une institutionnalisation du pouvoir. Mais précisément, le principe d’identité nous permet de problématiser cette institutionnalisation en posant cette question : comment penser les médiations politiques pour qu’elles ne deviennent pas une forme de négation de la démocratie en étant un dispositif oligarchique de la captation du pouvoir et de la puissance du peuple ? Question que l’on peut aussi décliner de cette façon : l’identité peut-elle être un principe réelle de structuration de la politique ou doit-elle nécessairement sombrer dans la loi de l’oligarchie ?

3- Radicalité démocratique et institutionnalisation de la participation populaire.

Précisément, la pensée de Rousseau possède cette actualité car elle nous fait sortir de ce que l’on peut appeler le pessimisme des médiations que l’on peut formuler avec Robert Michels. Pour cette conception, la démocratie doit subir « la loi d’airain de l’oligarchie »[12] : « La constitution d’oligarchies au sein des multiples formes de démocratie est un phénomène organique et par conséquent une tendance à laquelle succombe fatalement toute organisation ».[13] Nous pensons que l’identité de deuxième degré chez Rousseau présente une réponse à ce pessimisme des médiations pour lequel les pouvoirs constitués ne peuvent être qu’une pétrification de la puissance populaire.

Précisément, la première lecture, qui en appelle au réalisme politique pour rejeter la définition de la démocratie du Contrat Social, produit un Rousseau irréel par simplification de sa pensée. Alors peut se déployer une critique non de sa pensée, mais de sa caricature. En effet cette hypothèse de lecture part de cette certitude : Rousseau serait le défenseur de la démocratie directe. C’est à travers ce concept qui serait le principe même du Contrat Social que l’on devrait évaluer la réalité de la démocratie rousseauiste. Mais le problème est que, dans le Contrat Social, non seulement on ne trouve pas trace d’une défense de la démocratie directe, mais surtout Rousseau déclare son impossibilité et son illégitimité. C’est pour cette raison qu’il réserve la réalité d’une telle démocratie à « un peuple de Dieux » : « S’il y avait un peuple de Dieux, il se gouvernerait démocratiquement. Un peuple si parfait ne convient pas à des hommes »[14]. Rousseau, s’il utilise bien le terme de démocratie pour qualifier ce type de régime, il n’emploie pas le terme de « directe » car ce type de démocratie, même si le peuple dispose du pouvoir législatif, intègre nécessairement l’existence d’une différentiation institutionnelle du pouvoir politique et par conséquent d’intermédiaires : « La loi n’étant que la déclaration de la volonté générale, il est clair que dans la puissance législative le peuple ne peut être représenté ; mais il peut et doit l’être dans la puissance exécutive, qui n’est que la force appliquée à la loi »[15]. D’autre part, Rousseau admet comme nous l’avons vu  la nécessité d’intermédiaires au sein du pouvoir législatif. Mais il convient de souligner qu’il prend soin de distinguer la notion de représentant de celle de député. Par cette distinction, il veut nous faire comprendre que la différence entre un gouvernement représentatif et une démocratie, où l’éventualité de députés n’est pas écartée, ne réside pas dans l’existence d’intermédiaires, mais dans l’existence d’une logique politique qu’il définit comme spécifique à la représentation : la volonté politique des représentants devient indépendante de la volonté du peuple.

Par conséquent, réfléchir avec Rousseau sur la démocratie, ce n’est pas opposer la légitimité de la démocratie directe à l’illégitimité des régimes politiques qui disposent d’institutions intermédiaires empêchant une totale participation populaire, mais c’est s’interroger sur la différence qu’il produit entre un gouvernement fondé sur la représentation et une démocratie où le peuple peut élire des députés qui ne sont pas « ses représentants mais ses commissaires »[16]. On peut alors affirmer que Rousseau propose un troisième type de régime politique pour la modernité, régime que nous dénommerons démocratie figurative de mandataires.

Sa pensée est alors une théorie critique des formes représentatives des médiations politiques et non une critique de toutes les formes politiques de médiation faite au nom de l’immédiateté. Sa critique ne s’organise pas au nom de l’immédiateté, mais en vertu de l’identité qui doit inventer des médiations politiques autres que celles de la représentation. Ces médiations ne doivent donc pas capter la puissance populaire pour produire un peuple manquant, mais l’institutionnaliser pour la dynamiser, et lui servir de relais.

La pensée de Rousseau n’a donc pas un intérêt simplement archéologique, une pensée de pure interprétation de ses textes. Non ! Sa pensée est pleinement moderne car elle nous permet de poser ce problème : comment penser l’articulation entre la nécessité de mandataires de la volonté du peuple et l’institutionnalisation de la participation populaire ?

C’est dans les Considérations sur le gouvernement de Pologne et les Lettres écrites de la montagne que Rousseau est le plus précis sur ce système politique qu’il fonde sur quatre principes fondamentaux.

1- Il s’agit d’un système reposant sur l’élection au suffrage universel. La seule façon de légitimer le pouvoir des députés est de « les élire »[17]. L’élection doit être le seul mode de désignation des titulaires des charges politiques « car aucun poste n’est rempli que par le vœu de la nation »[18]. Cette défense du suffrage universel est un trait constant de la pensée de Rousseau. Dans le Contrat Social, il affirme « qu’aucun citoyen ne doit être exclu du droit de suffrage »[19].

2- Le second principe concerne d’une part la fréquence des assemblées des députés et le renouvellement de leur composition. A cet effet, Rousseau dit que l’assemblée reste « un organe de la liberté », si « les Diètes (assemblée des députés polonais) sont fréquentes et si elles changent souvent leurs représentants »[20]. C’est en favorisant le changement des députés que la démocratie conserve sa force. Le principe d’identité affirme donc qu’une médiation politique si elle veut rester démocratique doit reposer sur cette logique de l’élection : elle doit créer une véritable mobilité du pouvoir en rendant « le pouvoir passager »[21].

Mais une démocratie se définit aussi par les moyens dont les citoyens disposent pour  contrôler le pouvoir.

3- Rousseau fait reposer la démocratie sur ce rapport de proportionnalité : plus importante est la puissance d’une institution, plus importants doivent être les moyens de contrôle de cette médiation et plus grande doit être la responsabilité du médiateur. Le moyen central de ce contrôle et de cette responsabilité est le mandat impératif. Rousseau souhaite que les députés suivent les instructions précises de leurs électeurs : « Il faut assujettir les représentants à suivre exactement leurs instructions et à rendre un compte sévère à leurs constituants de leur conduite à la Diete »[22]. Ce système est solidaire du principe de la révocabilité permanente des députés. C’est la solidarité de ces deux principes, mandat impératif et révocabilité permanente, qui assure la coïncidence entre la volonté des électeurs et la décision des députés, puisque les électeurs peuvent immédiatement sanctionner des députés qui ne respecteraient pas leurs volontés politiques : « C’est sur ces instructions que les députés doivent à leur retour rendre compte de leur conduite aux Dietines (disons le collège électoral ou la circonscription électorale) […], et c’est sur ce compte rendu qu’ils doivent être ou exclus de toute nonciature subséquente, ou déclarés derechef admissibles quand il auront suivi leurs instructions à la satisfaction de leurs constituants »[23].

C’est bien l’interdépendance du mandat impératif et de la révocabilité permanente qui est au cœur de l’identité démocratique de second degré. La révocabilité est essentiellement associée à la vision politique d’une mobilité du pouvoir. En fondant la politique sur l’électeur et non sur l’élu, Rousseau nous signifie que la mobilité du pouvoir doit rester à l’initiative des citoyens. Ils peuvent à tout moment révoquer un député qui prendrait des décisions contraires à l’intérêt général.

C’est sur ce point que l’élection connaît un élargissement de son sens. En effet l’élection n’est pas un dispositif de déperdition de la puissance du peuple. Avec le mandat impératif, elle reste certes un mode de désignation. Mais cette désignation porte sur un mandataire qui est entièrement dépendant de la volonté de ses électeurs car il ne fait qu’appliquer leurs instructions et décisions. Les citoyens par le moyen du mandat impératif gardent donc l’initiative de la décision. La possibilité de révoquer à tout moment son député montre aussi que les citoyens disposent en continu de leur puissance d’intervention politique. Le changement de député ne doit pas attendre une date fixée par un agenda constitutionnel. C’est la volonté des citoyens qui crée l’agenda même du politique : ils gardent à tout moment l’initiative politique de démettre par le vote un député qui aurait mal figuré leur projet de loi.

Les médiations politiques ne suppriment pas la puissance du peuple puisqu’il garde l’initiative du politique. On peut même dire que les médiations politiques prolongent le principe d’identité puisque l’initiative des citoyens est découplée en un versant positif et un versant critique. Le moment positif correspond au fait que la médiation ne court-circuite pas la puissance du peuple car les citoyens gardent l’initiative des lois à travers leurs projets législatifs qui deviennent les instructions que le député doit défendre. Par le moyen des instructions qu’ils produisent, les citoyens continuent donc à participer au pouvoir législatif, même si cette participation s’opère par la médiation d’un député. A travers la possibilité de révoquer un député, les citoyens conservent leur puissance critique qui n’est pas simplement une puissance verbale mais la possibilité réelle de modifier la composition de l’assemblée. Ainsi l’institutionnalisation de la puissance populaire doit réfléchir à des moyens de rendre toutes les positions de pouvoir réversibles. En effet, pour que les institutions restent des relais fonctionnels de la volonté populaire, il est important que les fonctions politiques exercées par les individus soient toujours réversibles. Et cette réversibilité doit reposer sur cette puissance du peuple de révoquer leurs mandataires.

4- Cette puissance critique constitue un autre peuple, le peuple oppositionnel à travers ce que Rousseau appelle le droit de représentation. Ce droit qui est placé au cœur de cette tension pouvoir constituant / pouvoir constitués, donne une voix critique aux citoyens. Pour le présenter partons de cette affirmation : 

Hors des assemblées, le peuple souverain n’est pas anéanti ; ses membres sont épars, mais ils ne sont pas morts ; ils ne peuvent parler par des lois, mais ils peuvent toujours veiller sur l'administration des lois ; c'est un droit, c'est même un devoir attaché à leurs personnes et qui ne peut leur être ôté dans aucun temps»[24].

Ce passage distingue deux actes du citoyen qui correspondent à ses deux déterminations fondamentales. Le premier acte correspond à la participation de chaque citoyen au pouvoir législatif. En vertu de ce pouvoir, les citoyens «parlent par des lois». Dans le deuxième acte, le citoyen n'est plus législateur, mais il veille à ce que les lois correspondent effectivement à leur fin : la création de l'égalité. Cette vigilance, exercée par le citoyen est aussi un acte pleinement politique, non législatif, mais un recours contre la transgression des lois. Le citoyen dispose d'un droit de requête quand il estime que le gouvernement produit une mauvaise application des lois, c'est-à-dire quand il favorise non plus tous les citoyens, mais certains intérêts privés. Ce pouvoir de requête nous dit Rousseau est «un frein qui évite beaucoup d'iniquité»[25]. Le citoyen rousseauiste a donc le droit d'exprimer son désaccord avec l'application des lois opérée par le gouvernement. Avec ce droit, le citoyen garde l'initiative des lois, initiative non législatrice, mais initiative d'intervenir quand l'écart, entre la fin de la loi et son effet, produit une transgression de cette dernière. Rousseau donne une précision importante sur l'étendue de ce droit de représentation et par conséquent sur la possibilité que le citoyen a d'intervenir politiquement en dehors de son pouvoir législatif : «Les représentations peuvent rouler sur deux objets principaux [...]. De ces deux objets, l'un est de faire quelque changement à la loi, l'autre de réparer quelque transgression à la loi»[26]. Nous sommes ici en présence des deux causes principales qui produisent le décalage de la loi entre sa fin et ses effets et dont la conséquence est toujours la création de l'inégalité. Soit la loi est mal adaptée à la réalité sociale, soit elle a été transgressée. Ainsi, le citoyen intervient politiquement soit pour proposer une modification de la loi, soit pour exiger la fin de la transgression de la loi. La démocratie en continu comme exigence politique radicale c’est que le citoyen possède la possibilité toujours ouverte de rectifier une loi : telle est la vertu de ce droit de représentation. Mais il faut poser avec Rousseau cette question : comment éviter que ce droit soit illusoire et vain, comment éviter « qu'il n'apporte à la transgression des lois d'autre opposition, d'autre droit, d'autre résistance qu'un murmure inutile et d'impuissantes clameurs »[27] ? Si effectivement, comme Rousseau le réaffirme ce droit de représentation « se borne à la rare prérogative de demander et ne rien obtenir », il ne donne alors aucune efficience à l'intervention politique des citoyens.

Ce droit ne peut être « l'appui de la démocratie »[28] que parce qu’il est constitutif d’une vie démocratique, d’un véritable espace intérieur de la contestation et d’une certaine institutionnalisation du pouvoir.

Ce droit donne bien vie à une démocratie car il donne sens et contenu à la notion d'opinion publique. Rousseau, avec ce droit de représentation, affirme bien la nécessité politique d'une expression et d'une opinion publique auxquelles tout citoyen peut et doit participer : « l'effet des Représentations des particuliers [...] est de devenir la voix du public »[29]. Les citoyens, au moyen de « la voix du public qui s'élève »[30] créent un espace public qui est précisément celui de leur intervention politique. Cette intervention a pour but de contrôler le devenir des lois en rendant apparent, c'est-à-dire public, soit la nécessité de transformer une loi, soit la transgression d’une loi. Comme le dit Rousseau, avec le droit de représentation « toute transgression des lois devient une affaire publique »[31]. Pour Rousseau, la démocratie acquiert une pleine réalité si les citoyens ont la possibilité d'exprimer et de combattre les causes qui menacent l'exercice de leur puissance. Le droit de représentation constitue donc bien une opinion publique dont les citoyens sont à l’origine à partir de la connaissance de l’effet des lois.

Donc nous nous voyons bien avec ce droit de représentation que la notion de peuple se dédouble chez Rousseau. Nous avons un peuple de la législation et celui de la contestation, mais d’une contestation qui organise un véritable jeu institutionnel de l’opposition. Ce droit a donc un effet institutionnel précis : celui d'obtenir une réaction des institutions politiques et leur intervention. Ainsi, le droit de représentation n'est pas seulement une critique du pouvoir, mais organise un pouvoir de la critique :

Dans les représentations, l'avis des citoyens n'est que celui d'un particulier ou de plusieurs, mais ces particuliers étant membres du Souverain et pouvant le représenter quelquefois par leur multitude, la raison veut qu'alors on ait égard à leur avis, non comme à une décision, mais comme à une proposition qui la demande, et qui la rend quelquefois nécessaire[32].

Ainsi, dans une démocratie, les revendications politiques des citoyens, loin d'être des murmures inutiles, ont la possibilité de devenir des décisions politiques. Pour juger si la proposition des citoyens doit se transformer en décision politique, Rousseau définit une organisation spécifique du souverain et la nécessité de l'intervention d'une autre institution : le Tribunat. Par conséquent, il existe un mode de fonctionnement des institutions politiques qui ne peut s'activer qu'avec le droit de représentation, preuve s'il en est qu'aux yeux de Rousseau ce droit n'est pas une formalité vide. L'examen du droit de représentation se fait au sein de l'assemblée du peuple. Ce droit a donc une conséquence politique majeure car il a la possibilité de convoquer la plus haute puissance politique et de suspendre l'activité du gouvernement : « A l'instant, que le Peuple est légitimement assemblé en corps souverain, toute juridiction du Gouvernement cesse, la puissance exécutive est suspendue »[33]. Nous assistons alors à une distinction dans les motifs de réunion du Souverain. Le peuple se réunit soit pour légiférer, soit pour examiner et décider de la nature des conséquences politiques à donner aux requêtes des citoyens. Rousseau affirme la nécessité d'assemblées du peuple « périodiques qui se bornent aux plaintes mises en représentations » et dans lesquelles précise-t-il « il n'est pas permis d'y porter aucune autre question »[34]. Le droit de représentation organise bien un pouvoir de la critique car il est à l'origine de décisions et d'actes politiques spécifiques. Ce droit a la spécificité de produire un agencement des institutions, agencement dont le seul but est de mesurer la légitimité des revendications des citoyens concernant l’application d’une loi. C’est pour cette raison que Rousseau affirme bien la complémentarité absolue entre démocratie et droit de représentation, complémentarité qui n’est que la manifestation de la radicalité démocratique : « C'est dans une démocratie qu'on donne authentiquement aux citoyens, aux membres du souverain, la permission d'user de ce droit »[35]. L'usage authentique de ce droit donne bien à la démocratie la caractéristique de la continuité qui n’est autre que cette exigence politique : les citoyens ne doivent jamais perdre le droit d'être en activité, c'est-à-dire d'avoir le droit d'intervenir dans les institutions politiques.

Une démocratie fidèle à cette radicalité pense à un lien nécessaire entre la puissance constituante du peuple et les pouvoirs institués. Le droit de représentation est la manifestation de cette puissance constituante car en lui les citoyens conservent cette puissance de proposer à l’assemblée une modification des décisions législatives. Et cette puissance passe par le relais de pouvoirs institués, l’assemblée et le tribunat qui ne peuvent agir qu’à la demande des citoyens et dont la seule fonction et de réaliser la requête des citoyens. L’institutionnalisation du pouvoir n’est donc pas le signe nécessaire de la pétrification de la puissance du peuple car elle peut être pensée comme un prolongement de cette puissance. La médiation politique n’est donc pas irrémédiablement soumise à une logique oligarchique car elle peut être aussi le lieu d’une articulation entre la volonté du peuple de transformations sociales et une institution, le tribunat, qui donne effectivité à ce désir. Lorsque les citoyens ne reconnaissent plus, dans l'application de la loi, l'esprit d'égalité et de liberté qu'ils avaient tenté de lui communiquer, c'est dans la critique politique que se déplace, pour eux, le pouvoir d'exprimer les conditions de l'égalité et de la liberté. Mais cette critique n’est réelle que parce qu’elle se fonde sur un droit qui permet l’activation d’un agencement institutionnel particulier : le couplage entre l’assemblée et le tribunat. Par conséquent ce droit de représentation est placé au cœur de la tension démocratique entre la puissance constituante du peuple et les effets potentiellement oligarchiques des pouvoirs constitués. L’institution n’est pas un moindre mal dont il faudrait mieux se passer, mais elle est constitutive de la démocratie, constitutive d’une démocratie dans laquelle existe des pouvoirs constitués que les citoyens peuvent activer pour contrer des effets anti-démocratiques. Il y a donc démocratie non pas en l’absence d’institution, pure immanence de la volonté à elle même, mais quand cette volonté a la capacité de provoquer un agencement institutionnel  augmentant sa propre puissance politique.

Par conséquent, le problème de la démocratie n'est pas réglé en affirmant que le peuple détient la souveraineté. Il faut le compléter par cette question : les citoyens disposent-ils de moyens institutionnels pour critiquer et répondre à la création de l’inégalité politique ? C’est pour cette raison qu’une démocratie fait de ce droit de représentation un droit central de son dispositif politique, car il maintient ouverte la question de la légitimité politique en étant le moyen institutionnel dont dispose la démocratie pour répondre à la création de sa propre illégitimité.

Conclusion

Une démocratie ne conserve sa légitimité que si les citoyens possèdent les moyens d’intervenir dans les institutions politiques. La légitimité démocratique c’est donc aussi offrir la possibilité en continu aux citoyens de critiquer le pouvoir. La radicalité démocratique n’est alors que l’autre nom de cette possibilité pour le peuple de se dédoubler : d’être la puissance souveraine, mais aussi d’être une puissance de délégitimatiion des pouvoirs constitués quand ces derniers deviennent des lieux oligarchiques qui tendent à rendre muette la volonté générale.



[1] Rousseau, Fragments politiques, Du pacte social, 10, t. III, p. 484.

[2] Lettres écrites de la montagne,  Lettre 9, p. 889.

[3] Du Contrat Social, Liv. II, Chap. 1, p. 368.

[4] Lettres écrites de la montagne, Lettre 8, p. 841.

[5] Du Contrat Social, Liv. III, Chap. 15, p. 431.

[6] Du Contrat Social, Liv. III, Chap. 14, p. 428

[7] Du Contrat Social, Liv. I, Chap. 6, t. III., p. 361-362.

[8] Lettre à d’Alembert, t. V, p. 105.

[9] Idem., Liv. III, Chap. 13, p. 427.

[10] Du Contrat Social, Liv. II, Chap. 4, p. 373.

[11] Rousseau, Considérations sur le Gouvernement de Pologne, VII, t. III., p. 978.

[12] Robert Michels, Les partis politiques, Trad. S. Jankélévitch, Editions de l’Université de Bruxelles, 2009, p. 247.

[13] Ibid., p. 263.

[14] Contrat Social, III, 4, p. 406.

[15] Contrat Social, III, 15, p. 430.

[16] Le Contrat Social, III, 14, p. 428.

[17] Considérations sur le gouvernement de Pologne, XIII, p. 1022.

[18] Ibid., XII, p. 1019.

[19] Le Contrat social, IV, 4, p. 449.

[20] Rousseau, op. cit., VII, p. 979.

[21] Ibid., p. 977.

[22] Rousseau, op. cit., VII, p. 979.

[23] Rousseau, op. cit., p. 980.

[24] Lettres écrites de la montagne, lettre 8, p. 845.

[25] Ibid.p. 849.

[26] Ibid. p. 846.

[27] Ibid. lettre 9, p. 871.

[28] Ibid. lettre 8, p.850.

[29] Lettres écrites de la montagne, lettre 8, p. 850.

[30] Ibid. p. 850.

[31] Ibid. p. 850.

[32] Lettres écrites de la montagne, Lettre 8, p. 845.

[33] Contrat Social, III, 14, p. 427.

[34] Lettres écrites de la montagne, lettre 8, p. 854.

[35] Lettres écrites de la montagne, lettre 8, p. 844.